Les petits Blancs – Un voyage dans la France d’en bas
Le livre d’Aymeric Patricot a bénéficié de la publicité que lui a assurée Alain Finkielkraut à la télévision et dans son dernier ouvrage, L’identité malheureuse. Si Aymeric Patricot n’emploie jamais l’expression, c’est pourtant à eux, les Français de souche, perdants du système, paumés et précaires, qu’il s’est intéressé. Qui sont ces petits Blancs à qui s’est consacré A. Patricot ? Il s’agit de « ceux qui, tombés si bas sur l’échelle de la misère et de la déchéance, font honte au Blancs de condition correcte comme aux Noirs pourtant aussi pauvres » (p. 13).Salariés pauvres, smicards, allocataires miséreux, ils vivent comme ils peuvent, fuyant les centres-villes livrés aux caprices de la bourgeoisie, quittant peu à peu les grands ensembles des proches banlieues gagnés au communautarisme. Dans ce monde de la misère et de la désespérance, il y a de tout. C’est la force du livre d’Aymeric Patricot de montrer une population hétérogène, souvent éloignée de l’image d’Epinal qu’en livrent les médias. Le petit Blanc n’est pas forcément, et loin de là, un électeur du Front national, voire un fasciste en puissance portant béret basque et baguette de pain à la main. Bien sûr, beaucoup ne comprennent plus un pays qui, de leur point de vue, semble accorder plus de place à l’étranger qu’au Français de souche. L’exclusion dont ils sont victimes a tôt fait de les faire basculer dans un racisme primaire. Minoritaires chez eux, obligés de raser les murs, beaucoup d’entre eux ont basculé dans l’extrémisme. Mais, souligne l’auteur, ils sont également beaucoup à voir dans l’immigré qui s’installe à côté de chez eux les mêmes hommes et femmes qui, tout comme eux, connaissent la galère. Devant une vie aussi médiocre, où le moindre aléa peut faire tomber dans la misère et la déchéance, la couleur de peau et la religion importent peu.
Les petits blancs n’est pas un livre de sociologie comme beaucoup d’autres. Ici, ni jargon, ni courbes, ni statistiques compliquées. La force du livre tient en une accumulation de témoignages. L’ouvrage met également en lumière, même si au final il en parle très peu, l’aveuglement et la naïveté d’une classe politique qui semble se débarrasser avec désinvolture d’un problème qui risque de devenir explosif. Réintégrer tous ces Français ayant définitivement décroché est d’ores et déjà un défi majeur pour une société passablement déliquescente.
Aymeric Patricot, Les petits Blancs, Plein Jour, 2013, 163 pages, 17 €