Parmi la production livresque hostile au transhumanisme, l’ouvrage d’Olivier Rey se situe en bonne place. Alors que beaucoup sont réticents à faire le saut dans une société où la technologie sera reine et étendra ses rets à l’ensemble des activités humaines, le transhumanisme a inventé des ruses de guerre lui permettant d’amortir les bouleversements qui viennent, par exemple en diffusant la fable selon laquelle il est inutile de lutter contre le progrès et que, les véritables changements étant devant nous, il n’y a pas à s’inquiéter des changements qui ont déjà lieu. Or, écrit O. Rey, ces mutations signent le déjà-là du transhumanisme. Pour le dire autrement, « même ceux à qui le transhumanisme répugne subissent ses effets », parce que l’énergie qu’ils mettent à le critiquer « est souvent autant d’énergie qu’ils ne mettent pas à s’opposer à ce qui s’accomplit à présent » (p. 49). On ne s’en pas compte mais, par bien des côtés, le transhumanisme signe le triomphe post-mortem des théories nazies les plus mortifères. La seule différence, c’est qu’on le fait au nom des droits de l’homme et de l’épanouissement dont tout un chacun a droit.
Olivier Rey, Leurre et malheur du transhumanisme, Desclée de Brouwer, 2018, 194 pages, 16.90€
L’extrait : « … prôner le développement technologique sans limite, tout en prétendant que la démocratie saura prévenir les dérives (…) est une plaisanterie sinistre. » (p. 123)