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Histoire Recensions

1915 : L’enlisement

Broché: 388 pages
Editeur : Librairie Académique Perrin (17 octobre 2013)
Langue : Français
ISBN-10: 2262030359
ISBN-13: 978-2262030353
Dimensions : 21 x 14,2 x 3,6 cm

 1915 : L’enlisement

Des cinq années que couvre la Première Guerre mondiale, l’année 1915 est probablement la moins connue. 1914, c’est la bataille de la Marne ; 1916, Verdun ; 1917, le Chemin de Dames ; 1918, l’année de la victoire. Dans l’imaginaire collectif, la deuxième année de la guerre ne fait référence à aucun épisode majeur, comme si le front s’était totalement figé dans la boue des tranchées. Comme le sous-titre de l’ouvrage l’indique, si 1915 est synonyme d’enlisement, ce n’est pas que rien ne se soit passé ; au contraire, le Front de l’Ouest a connu deux offensives françaises majeures, en Artois et en Champagne. L’Etat-Major n’envisage qu’une guerre courte. Il faut donc forcer la décision. Celle-ci se fera par des poussées partielles sur telle ou telle partie du front et par des offensives de grand style. Dans l’esprit de Joffre, le généralissime des Armées françaises, cette stratégie vise à grignoter l’ennemi, lui infliger des pertes telles qu’il se résolve à la paix. N’étaient justement ces pertes, on pourrait rire de ces manœuvres de gribouille qui affaiblissaient infiniment plus l’attaquant que le défenseur. Face aux mitrailleuses allemande, le sacrifice de l’infanterie française fut totalement vain : plus de 300 000 morts pour récupérer quelques kilomètres carrés, gain dérisoire au regard des pertes. Ces échecs attestaient la faillite d’états-majors ineptes parce qu’adeptes d’offensives à outrance tournant toujours à la boucherie. Dès lors, on ne pouvait plus l’ignorer : la guerre allait durer.

Servi par un remarquable esprit de synthèse, Jean-Yves Le Naour décrit tous les aspects d’un temps indissociable de la guerre : la vie aux armées et à l’arrière, le jeu politique, les luttes de faction entre militaires, la mutation industrielle, la guerre à l’Est et en Orient… Dans cette vaste fresque, l’auteur pointe particulièrement la médiocrité de généraux – Joffre le tout premier – qui ne comprennent pas que le courage ne vaut rien face à la mitraille. Le malheur est que les militaires imposent leurs vues criminelles à une classe politique atone de laquelle se sont retranchés les plus lucides comme Clemenceau. Quant à l’Union Sacrée, Jean-Yves Le Naour la décrit davantage comme un pis-aller que comme un choix mûrement accompli et ardemment désiré.

Couvrant tous les aspects du conflit, 1915 éclaire de façon convaincante une année triste et méconnue.

 
Jean-Yves Le Naour, 1915, L’enlisement, Perrin, 2013, 388 pages, 23 €