Dictionnaire amoureux des dictionnaires
Dans la série des Dictionnaires amoureux publiée par les Editions Plon, celui consacré aux dictionnaires, que l’on doit à la plume précise et féconde d’Alain Rey, est sans doute le plus fourni. C’est que, aidé par une érudition sans failles, Alain Rey multiplie les entrées, tant classiques qu’originales. L’essentiel de ce monument est occupé par des biographies de créateurs, de tous ceux qui, dès les temps les plus anciens, avaient le ferme désir de mettre en catalogues la totalité du savoir connu. Le travail qu’ils ont fourni donne lieu à la seconde grande série des entrées de ce Dictionnaire amoureux ; je veux parler des grands dictionnaires qui, sous tous les temps et toutes les latitudes, ont marqué le savoir humain : dictionnaires allemands, anglais, chinois ou arabes, latin (merci Gaffiot !) et grec (merci Bailly !). Si le livre d’Alain Rey se moque des records, il n’omet pas d’exhiber des données parfois vertigineuses, comme ce dictionnaire chinois du XV° siècle qui finit par atteindre onze mille volumes ! Plus de deux mille rédacteurs s’y étaient attelés.
D’une précision diabolique, ce Dictionnaire amoureux des dictionnaires se caractérise surtout par la virtuosité de son auteur. Auteur de plusieurs dictionnaires dont le célèbre Dictionnaire culturel, Alain Rey fait preuve d’une science quasi universelle. Existe-t-il un dictionnaire au monde dont il n’ait entendu parler ? Paradoxalement, c’est peut-être cette profusion qui déconcerte le lecteur. Emmené sur des chemins inconnus, il risque d’être désarçonné par la fougue de l’auteur de ce dictionnaire pas tout à fait comme les autres. L’historien Jacques Le Goff était, aujourd’hui disparu, était appelé l’ « ogre historien » du fait de son appétit de travail. Ne pourrait-on pas qualifier Alain Rey, par comparaison, d’ « ogre linguiste » ?
Alain Rey, Dictionnaire amoureux des dictionnaires, Plon, 2011, 998 pages, 27 €