L’art de la marche
Ils sont de plus en plus nombreux à déguerpir, à fuir le monde bruyant et animé qui nous environne, pour marcher, s’emplir les poumons de l’air de la liberté. Que l’on soit pèlerin de Compostelle ou marcheur au long cours, c’est là le sentiment qui domine. S’affranchir du temps, de l’espace, des préoccupations journalières, il n’y a rien de mieux en matière de liberté. Lorsqu’il quitte Paris pour rejoindre une cabane située au fin fond de la Sibérie, c’est à l’accomplissement d’une liberté pleine et entière qu’aspire Sylvain Tesson. L’écrivain Olivier Bleys, qui livre son témoignage autour de L’art de la marche, est titillé par le même besoin. S’ajoute chez lui, semble-t-il, le goût de rompre la monotonie du quotidien en s’affligeant maux et tracas. L’auteur s’est donné comme défi de faire le tour du monde par étapes annuelles. Tous les ans, durant l’été, Olivier Bleys accomplit un périple de plusieurs centaines de kilomètres : d’Albi à Lyon, puis de Lyon à Alberville, d’Alberville à Andermatt en Suisse… Commencé à Albi, le récit qu’il livre ici s’achève en Hongrie, à quelques encablures de l’Ukraine. Dans un style délié, Olivier Bleys fait valoir ses talents de conteur… et de marcheur. Le périple qu’il accomplit, aussi loin que possible de la civilisation, atteste de réelles qualités physiques. Il s’avère que, même dans notre petite Europe, il est possible de vivre l’aventure. Pour ce faire, mieux vaut choisir de longues distances et préférer l’altitude et les sommets au cours plus rapide et plus sûr – mais plus encombré et plus pollué ! – que les vallées. Quand trouver de l’eau s’avère une tâche redoutable, le récit passionnant d’Olivier Bleys fait prendre conscience du confort qu’offre la civilisation.
Surgissent ici et là, cerise sur le gâteau d’un récit plein de panache, de pertinentes réflexions sur l’aménagement du territoire, pour dénoncer par exemple cette surenchère de panneaux, chicanes et dos d’âne qui défigurent nombre de nos villages. Un magnifique récit.
Olivier Bleys, L’art de la marche, Albin Michel, 2016, 227 pages, 16€