Pourquoi faudrait-il toujours s’intéresser aux gens célèbres, aux gouvernants, à ceux qui font l’actualité ? Et ceux qui sont demeurés dans l’ombre, qu’en fait-on ? Laure Moulin a vécu dans l’ombre de son frère Jean, le plus célèbre des résistants de la France occupée. Entre les soins à ses vieux parents, les voyages et les cours (elle était professeur d’anglais à Montpellier), elle aurait dû mener une existence bien ordinaire. Mais voilà, les événements en ont décidé autrement. Attachée indéfectiblement à la république, accablée de voir le pays occupé par les Allemands, elle ne réfléchit pas longtemps avant de prêter main forte à son frère Jean. Thomas Rabino donne l’occasion de saluer ce petit bout de femme, « résistante et sœur de héros ». Sa vie fut une vie donnée, une vie sacrifiée en grande partie à la mémoire de son illustre frère. Elle lui servit de secrétaire mais elle fut surtout celle à qui son frère se confiait. Quand on menait une vie si dangereuse, avec la Gestapo à vos trousses, avoir une confidente et une amie comme l’a été Laure était d’un grand secours.
Thomas Rabino, Laure Moulin, Perrin, 2021, 309 pages, 22 €
L’extrait : « L’icône que devint Jean Moulin à la suite de panthéonisation de 1964 a longtemps occulté aux yeux du grand public des pans entiers de la Résistance et une foule de personnalités, à commencer par celle sans laquelle Moulin n’aurait pu être le héros que l’on connaît. » (p. 15)
Il existe bien une exception américaine ! Thomas Rabino, dans cet éclairant essai, en donne d’éclatantes preuves. L’ouvrage, dont le titre est un clin d’œil à Tocqueville et à sa Démocratie en Amérique, postule l’idée que la culture de guerre fait partie de l’identité des Etats-Unis. Ceux-ci constituent l’exemple rare, voire unique, d’un pays libre et démocratique qui a élevé la culture des armes à un niveau rarement atteint. Que les Américains aient pris les armes pour acquérir leur indépendance lors de la seconde moitié du XVIII° siècle, soit ! Qu’ils se soient constitués en « arsenal des démocraties » pour abattre le nazisme et le fascisme, cela se conçoit aussi. Par contre, qu’après la Seconde Guerre mondiale ils aient été impliqués dans autant de guerres est plus surprenant. Mieux, c’est la seule démocratie à faire de la force militaire le fondement essentiel de sa puissance. Alors que l’Europe désarme, les Etats-Unis ne cessent d’augmenter leur budget militaire. Ce sont leurs bases et leurs porte-avions qui leur permettent de peser d’un tel poids dans les affaires du monde. Cette force est alimentée par des lobbies, un appareil militaro-industriel énorme et un patriotisme farouche. Les attentats du 11-Septembre ont permis de voir à quel point ce pays était atteint de fièvre guerrière. Dans cet essai percutant, Thomas Rabino dissèque les fondements de la culture de guerre propre à cette belliqueuse nation. Les multiples guerres dans lesquelles le pays a été engagé ainsi que la crainte de la menace terroriste ont sanctuarisé le territoire. Des médias peu objectifs créent une psychose propre à maintenir en armes un pays déjà envahi par quelque 300 millions d’armes individuels. Un patriotisme exacerbé tait toute tentative de s’opposer à cette sacralisation de la guerre. Quant aux opposants, comme le rappelle à satiété l’auteur, ils sont contraints à faire profil bas. L’inclination pour la guerre, et c’est le plus inquiétant, tient pour une grande part à une esthétisation de la violence, à un culte des engins de mort qui, parfois, n’est pas sans rappeler ce qui se passait dans les totalitarismes du XX° siècle. Mais, en l’occurrence, c’est l’appareil démocratique, vocabulaire et structures en tête, qui mène le bal des faux derches.
Toutefois, la conclusion de Thomas Rabino soulève quelque espoir de détente. Les avanies subies à l’extérieur (Irak) et sur son propre sol (la mauvaise gestion de l’ouragan Katrina) imposent de la modération. Il ne faudrait pas que, par un malsain retour de balancier, qu’interventionnistes à tout prix les USA redeviennent ce qu’ils ont été à un moment donné, des isolationnistes frileux.
Thomas Rabino, De la guerre en Amérique, Tempus, 2013, 751 pages, 12€
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